Nathalie Portilla Hoffmann est docteure en Sciences de l’éducation. Elle a soutenu sa thèse en avril 2023 (Urmis Paris).
Titre : « Résister depuis l’école. Une ethnographie des Écoles intégrales d’éducation basique au Michoacán (Mexique) »
Directrice de thèse : Marie Salaün
Membres du jury :
- Bruno BARONNET, Professor, Universidad Veracruzana (Mexique), rapporteur
- Inés DUSSEL, Professor, Instituto Politécnico Nacional (Mexique), rapportrice
- Laurent FRAJERMAN, Docteur, membre invité
- Étienne GÉRARD, Directeur de Recherche, Université Paris Cité, examinateur
- Marie SALAÜN, Professeure des Universités, Université Paris Cité, directrice de thèse
- Blanca Flor TRUJILLO REYES, Professor, Universidad Pedagógica Nacional (Mexique), examinatrice
Résumé :
Afin d’analyser la résistance en actes, au ras du sol, depuis des pratiques pédagogiques ordinaires resituées dans leur contexte, cette thèse porte sur la proposition pédagogique alternative du syndicat dissident d’enseignants·es du Michoacán (Mexique). Elle mobilise pour cela un ancrage théorique puisant dans les sciences de l’éducation et l’anthropologie de l’éducation, et une méthodologie qualitative, l’observation ethnographique.
Depuis la profession qui est la leur, l’enseignement, et à partir du pouvoir politique qu’ils·elles construisent en tant que membres d’un mouvement social, ces enseignants·es ont pensé, écrit et mis en œuvre, au sein des écoles d’éducation basique dites intégrales, un curriculum alternatif et politiquement situé à gauche. Ces écoles sont brandies comme outil de lutte et de résistance face aux réformes éducatives nationales répondant aux injonctions internationales.
En analysant cette lutte spécifique, cette thèse s’inscrit dans des questionnements plus généraux concernant les formes de subversion du nouvel ordre éducatif mondial. Par le fait même d’être menée au sein de l’espace scolaire, la résistance se trouve soumise aux mêmes tensions et aux mêmes contradictions que l’école. Les enseignants·es doivent en même temps faire l’institution et lui résister.
Dans ce mouvement social, les enseignants·es mobilisés·es ont pour référence un passé révolutionnaire. Néanmoins, la structure et la dynamique corporatiste mexicaine font également partie du mouvement dissident. Cette thèse propose un regard par le bas, individualisé, qui témoigne des dispositions de chaque enseignant·e en termes de valeurs. Quelles que soient les positions personnelles de chacun·e, le groupe syndical dissident a travaillé pour écrire un curriculum alternatif. Celui-ci est un objet autour, ou à partir duquel, se mettent en place des stratégies administratives, politiques ou pédagogiques pour soutenir la lutte de ces enseignants·es. Cet objet légitime les discours, à l’interne dans le syndicat comme à l’externe quand ils sont dirigés vers la société dans son ensemble. Une fois appliqué, le curriculum se retrouve dans les écoles intégrales qui sont, après tout, des écoles comme les autres : une cour, des salles avec leurs tableaux, pupitres, cahiers et un enseignant face aux élèves. Pour autant, il est possible, dans l’enceinte de ces écoles, de dévoiler l’arbitraire des contenus scolaires, de questionner la structure pédagogique d’un cours, d’y élever des poissons pour les vendre, et même, de reproduire l’école officielle.