APPEL : École d’été “Migrations et mondialisations. Identifications, représentations, catégorisations”

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Date limite pour candidater : 11 février 2022

Texte de l’appel pour l’École d’été “Migrations et mondialisations. Identifications, représentations, catégorisations”, organisée par les laboratoires CEPED-MIGRINTER-URMIS 11-15 juillet 2022, Nice

Pour la troisième édition de cette école d’été Migrations et Mondialisations, la réflexion portera sur les questions identitaires dans le contexte de mondialisation actuel, en en lien avec les enjeux de représentations et de catégorisations. Il s’agit en effet d’interroger les effets identitaires des représentations (institutionnelles, médiatiques, sociales, politiques) qui sont produites et qui circulent au sujet des migrant·es ou des populations dites « issues de l’immigration ». Inscrites dans des rapports de pouvoir, ces représentations mettent en jeu des catégorisations qui classent et hiérarchisent les individus et les groupes sur des échelles du « mérite », de la légitimité, de la citoyenneté et des droits. Ces représentations varient par ailleurs dans le temps et l’espace et leurs analyses dessinent des spatialités migratoires complexes. La crise sanitaire liée à la Covid-19 a depuis deux ans un impact direct sur ces dynamiques, en visibilisant certaines figures de migrant·es et en produisant/réactivant certaines catégorisations (dont celles liées à la santé) pour l’accès à la mobilité, au séjour ou à la nationalité.

L’école d’été vise à nourrir la réflexion sur les concepts, les cadres théoriques et les méthodes qui permettent aux sciences sociales dans leur diversité de saisir la complexité de ces processus. Plusieurs modalités de travail sont proposées : conférences plénières suivies de temps de discussion, ateliers de travail en petits groupes (constitués selon les orientations des travaux des doctorant·es), temps de restitution, évènements hors les murs. Les enjeux théoriques et méthodologiques discutés dans les ateliers de travail s’appuieront directement sur les préoccupations qui sont celles des doctorant·es.

L’école d’été propose trois axes généraux de questionnement, non exclusifs les uns des autres, qui feront écho aux travaux des doctorant·es et qui nourriront les échanges lors des conférences et ateliers tout au long de la semaine.

Dans la lignée des précédentes éditions de l’école d’été, les doctorant·es hors de France et d’Europe sont encouragé·es à participer.

Analyser les processus d’identification liés aux expériences migratoires

Le concept d’identité est très discuté en sciences sociales. Soulignant sa dimension essentialiste, homogénéisante et fixiste, certain·es chercheur·ses plaident même pour son abandon. L’école d’été permettra de revenir sur ces débats et d’interroger les approches et notions alternatives qui peuvent être utilisées dans les recherches sur les migrations.

Le contexte de mondialisation est un des facteurs expliquant la centralité du prisme identitaire dans les sociétés contemporaines : en multipliant les situations d’hétérogénéité, de mobilité et d’échanges, il nourrit une « obsession » de l’identité et des crispations qui s’expriment dans des discours politiques, des formes de gouvernement, des conflits ou encore dans les quêtes personnelles des individus. Si les sciences sociales doivent

s’émanciper de ce prisme, les phénomènes migratoires par leur dimension nécessairement dynamique, offrent aux réflexions qui prennent les questions identitaires pour objet un cadre particulièrement riche. Loin des approches substantialistes du terme, le regard développé dans le cadre de cette école d’été appréhende les phénomènes identitaires comme des construits sociaux, qui dépendent des contextes institutionnels et politiques, mais aussi, à un niveau plus microsocial, des interactions et des situations. Il s’agit de prendre en compte, dans l’analyse des expériences migratoires, la multiplicité et la complexité des identifications, leur caractère labile et variable selon les situations, tout comme la dimension stratégique et performative qu’elles peuvent recouvrir. Considérer la dimension spatiale des expériences migratoires amène aussi à souligner l’importance des appropriations, à la fois individuelles et collectives, des espaces de vie dans la compréhension de ces identifications. En adoptant une perspective intersectionnelle, cette école d’été vise également à analyser la manière dont le statut migratoire, la nationalité, la race, l’ethnicité s’articulent avec d’autres catégories (la classe sociale, le genre, notamment) dans les discours, les politiques publiques ou encore les relations sociales et pratiques spatiales ordinaires.

L’école d’été sera l’occasion de s’interroger, parmi d’autres questions, sur la fabrique et les effets des « politiques de l’identité » à différents niveaux (local, national, global). Elle permettra aussi de réfléchir à la circulation des représentations, des imaginaires collectifs, des symboles identitaires, des pratiques culturelles au-delà des frontières nationales, dans un jeu permanent entre l’échelle « locale » et l’échelle « globale ». Dans ces circulations, les réseaux sociaux (à travers la figure du·de la migrant·e connecté·e) jouent un rôle qu’il s’agira d’interroger. D’autres pistes de réflexion pourront porter sur la construction et la transformation des identifications tout au long du parcours migratoire, ou sur les processus de socialisation et leurs répercussions identitaires dans les familles de migrant·es et les générations ultérieures. On s’interrogera également sur la manière dont les individus et les groupes s’approprient, recomposent ou contestent les catégorisations et assignations identitaires à l’œuvre dans les discours publics et les politiques institutionnelles, ou manient d’autres catégories, y compris à travers une diversité d’usages linguistiques. Une attention particulière sera portée à l’influence des contextes (nationaux, locaux, sociaux…) sur ces processus, ainsi qu’aux effets de la situation sanitaire sur les catégorisations et les conditions de circulation et de vie des migrant·es.

Comprendre les discours et les représentations sur les migrations

L’école d’été propose à la fois de prendre du recul et de scruter de près les discours portant sur les migrations, en analysant la diversité de représentations sur lesquelles ils s’appuient. Tant individuelles que collectives, symboliques que matérielles, les représentations sont définies et mobilisées en sciences sociales de manière très variable. Tirant partie de cette polysémie, il s’agira de s’intéresser à la « fabrique » des représentations portant sur les phénomènes migratoires, leurs contextes de production et la manière dont elles circulent, se transforment, et rendent visibles les migrations dans les sociétés contemporaines. En forte interaction avec les pratiques (de vote par exemple), les représentations des migrations sont à considérer comme un enjeu de pouvoir. Utiliser ce prisme amène également à travailler sur les représentations des migrant.es eux-mêmes, par exemple leurs représentations spatiales, particulièrement utiles pour comprendre les projets migratoires et leurs évolutions. Il nous invite aussi à penser la multiplicité des points

de vue (migrant.es, États, agences internationales, médias, sociétés civiles à différentes échelles, etc.) participant à la production de représentations nombreuses et parfois contradictoires, des phénomènes migratoires. L’analyse de ces représentations multiples montre leur concours important à la création ou au renforcement de catégories, et aux processus d’identification.

Une des questions travaillée portera sur les représentations médiatiques. Les discours médiatiques et l’importance des images qui les alimentent conduisent à visibiliser certaines migrations et à en invisibiliser d’autres (par exemple, les migrations féminines). On pourra s’interroger sur les ressorts imaginaires de ces représentations, leur caractère situé, en considérant les catégorisations du monde et des personnes qu’elles véhiculent. Doit être aussi interrogé la manière dont les discours portés par les migrant·es ou par leurs descendant·es construisent des représentations alternatives. La réflexion portera également sur la circulation de ces discours sur les réseaux sociaux par exemple ou encore leur production dans des contextes spécifiques comme les mobilisations collectives. L’attention à la circulation de ces discours amène à penser leur portée transnationale mais aussi trans- générationnelle.

En s’intéressant à la diversité des discours, via notamment la multiplicité des modalités de représentation matérielle (photographie, film, carte, dessin, textes, etc.), il s’agit aussi de comprendre la dimension intertextuelle de ces productions discursives, la manière dont elles circulent entre monde institutionnel, politique, médiatique, militant, artistique, et scientifique. De nombreuses pistes de réflexion peuvent s’ouvrir comme l’importance des thématiques migratoires et des paroles de migrant·es au sein des pratiques artistiques, ou encore la place des représentations des migrations dans les politiques publiques. Dans ce cadre, le rôle de la recherche sur les migrations, en tant que productrice de discours et de représentations, pourra être interrogé, de même que sa réception, son utilisation ou son absence d’écho dans d’autres sphères. L’enjeu éthique et déontologique que constitue la restitution des résultats de recherche sera considéré, tout comme celui de l’adaptation de ces restitutions en fonction des publics visés (scientifique, grand public, médias, associations…), et des précautions/responsabilités de la recherche dans la diffusion de ces discours.

Étudier les migrations : jeux de catégories et d’identifications

Alors que le travail de recherche des participant·es doctorant·es est en cours, l’école d’été souhaite leur proposer un regard réflexif sur leurs usages conceptuels et sur leurs méthodes de recherche sur les migrations. Seront dans ce cadre interrogées l’utilisation, la construction et la déconstruction de catégories au cœur même de la production de connaissances. On pourra ainsi se demander quelle place donner aux catégories administratives, juridiques et statistiques qui structurent l’appréhension des phénomènes migratoires. Ces catégories sont reliées à des politiques et à des espaces particuliers, mais se diffusent aussi au-delà de leurs frontières initiales, en étant reprises et parfois transformées. Le·la chercheur·se peut participer de ces circulations ou au contraire y résister.

L’importance des critères de catégorisation administrative dans le parcours des personnes migrantes dans le cadre de l’accès aux droits (demandeur·ses d’asile, réfugié·es, personnes vulnérables, dubliné·es, mineur·es isolé·es étranger·es par exemple) rend ces catégories à la fois omniprésentes et changeantes sur les différents terrains d’enquête, dans les pays de

départ, de passage, comme d’installation. Elles organisent de plus des « bifurcations » dans les parcours de régularisation et dans leur vécu, qui peuvent avoir de lourdes incidences.

Les catégories statistiques soulèvent quant à elles plusieurs questionnements. Il s’agira d’interroger la manière dont elles reflètent des modes de pensée et des histoires singulières (une langue, un cadre national/local, etc.). On pourra aussi réfléchir à la construction et à la circulation de ces catégories statistiques dans des espaces transnationaux. Véritable enjeu politique, la production de chiffres et de catégories sur les migrations doit également être comprise de l’intérieur des institutions qui les fabriquent et les font circuler. Le rôle du·de la chercheur·se à cet égard, la manière dont il·elle reprend, interprète et déconstruit des catégories déjà existantes ou en propose de nouvelles, mérite d’être interrogé.

D’autre part, le travail réflexif conduira à considérer la place des identifications et de l’image sociale du·de la chercheur·se dans la conduite de son travail et ses relations avec le groupe étudié. En s’appuyant sur les travaux anciens et nombreux sur les savoirs situés, et sur des recherches et débats plus récents sur l’ethnicisation et la racialisation des chercheur·ses dans les sciences sociales, les enjeux soulevés par les situations d’interaction avec le terrain pourront être travaillés. L’adaptation des méthodes, de leur mise en œuvre et de leur restitution au regard des enjeux identitaires qui se déploient dans les situations migratoires étudiées pourra également être abordée. Se posent par exemple les questions de l’interprétariat, de l’adaptation de méthodes classiques tels que l’entretien semi-directif ou le questionnaire, de l’anonymat des participant·es aux enquêtes, ou encore de la place des images dans la restitution.

Fonctionnement de l’école d’été et modalités de candidature

Les conférences

Trois matinées de l’école d’été seront consacrées à la présentation de conférences qui permettront d’aborder la thématique de manière pluridisciplinaire. Les doctorant·es seront invité·es à préparer la discussion des conférences (présentation des conférencier·es et animation du débat).

Les ateliers de travail : méthodes et réflexivité

Ces ateliers viseront à réfléchir aux concepts, aux cadres théoriques et aux méthodes utilisés dans les recherches sur les migrations qui interrogent les questions identitaires, les représentations et les catégorisations. Les doctorant·es seront amené·es à y présenter leurs questionnements. Les pourront également prendre la forme d’ateliers de discussion de textes, commentés à l’aune des terrains et des problématiques spécifiques des doctorant·es ; d’ateliers méthodologiques donnant à voir une multiplicité de méthodes d’enquête et d’outils de représentation des données ; d’ateliers réflexifs, par exemple autour des enjeux identitaires ou émotionnels du travail d’enquête ; d’ateliers relatifs à l’écriture et à la publication de textes (en particulier sur des thématiques sensibles comme les migrations ou les rapports de race). Les ateliers seront organisés par groupes (3 groupes de moins de 10 doctorant·es). Ces groupes et les contenus précis des ateliers seront définis en lien avec les propositions et préoccupations des doctorant·es présentées dans le dossier de candidature.

Modalités de candidature

Les doctorant·es intéressé·es par l’école d’été sont invité·es à candidater quel que soit le niveau d’avancement de leur thèse, leur lieu d’inscription et leur terrain d’étude. Ils et elles enverront un dossier de candidature constitué de trois éléments :

  1. Prénom et nom ; discipline ; université et laboratoire ; année de première inscription en thèse et année de thèse actuelle
  2. un CV d’une page/une page et demi
  3. une brève description du travail de thèse (5000 signes maximum)
  4. une présentation des enjeux théoriques et méthodologiques que le.la doctorant.e souhaiterait discuter lors des ateliers de travail en lien avec les thématiques de l’école d’été (5000 signes maximum).

Les candidatures sont à envoyer en un seul fichier PDF d’ici le 11 février à l’adresse suivante: ecolemetm@sciencesconf.org

L’hébergement à Nice sera pris en charge et une prise en charge des frais de transport pourra être envisagée. L’arrivée des doctorant·e·s est à prévoir pour le dimanche 10 juillet en fin de journée.

Un certificat sera délivré afin de pouvoir valider cette formation auprès des écoles doctorales.

La langue de travail sera le français, mais les communications en anglais seront acceptées. Pour toute question sur l’école d’été : ecolemetm@sciencesconf.org

Comité scientifique : Michelle Auzanneau (linguiste, Ceped), Géraldine Bozec (sociologue, URMIS), Kamel Doraï (géographe, Migrinter), Gilles Frigoli (sociologue, URMIS), Brenda Le Bigot (géographe, Migrinter), Olivier Leservoisier (anthropologue, Ceped), Françoise Lestage (anthropologue, URMIS), Adelina Miranda (sociologue, Migrinter), Naik Miret (géographe, Migrinter), Véronique Petit (démographe, Ceped), Aude Rabaud (sociologue et anthropologue, URMIS), Franck Temporal (sociodémographe, Ceped).

Comité d’organisation : Thomas Bofill (doctorant en sociologie, URMIS), Laura Bouillette (doctorante en géographie, Migrinter), Géraldine Bozec (sociologue, URMIS), Brenda Le Bigot (géographe, Migrinter), Léo Manac’h (doctorant en anthropologie, Ceped), Stélios Moraïtis (doctorant en anthropologie, URMIS), Célia Nguyen (doctorante en sociologie, URMIS), Flora Penot (doctorante en géographie, Migrinter).