1. Programme 1.1. : Travailleurs et élites circulants

Chercheur-e-s : V. Erlich, S. Potot, F. Sirna, S. Souchaud, M. Timéra, Dom. Vidal

 Chercheure associée : M. Paris

 Doctorant-e-s : M. Anglada, A. Després, B. Dicko, Christelle Fitaten Hounsou, E. Hellio, F. Tandjigora, R. Dahhan

La migration volontaire, économique ou pour études, est la plupart du temps envisagé par ses acteurs comme un moyen d’ascension sociale, que celle-ci se réalise dans le pays d’arrivée ou dans la région d’origine. Qu’il s’agisse de se lancer dans ” les affaires “, à  quelque niveau que ce soit, de vendre sa force de travail dans un pays où elle sera mieux rémunérée ou bien d’acquérir des savoirs et compétences à  l’étranger, les migrants cherchent à  améliorer leur niveau de vie, même si pour cela ils doivent accepter durant une période un certain déclassement. Que les États accompagnent ces mouvements ou bien qu’ils s’y opposent, l’initiative en revient aux migrants et parfois à  la communauté, la famille, les proches qui soutiennent d’une façon ou d’une autre le projet migratoire. Si l’on escompte des retombées de ces départs, ils ont aussi un coà»t qui semble de plus en plus élevé dans une conjoncture où les pays dits riches se sont lancés dans de vastes programmes de gestion des migrations qui impliquent une limitation des mobilités, une gestion rigoureuse des migrations autorisées et un contrôle accru de leurs frontières. En réponse à  ces mesures répressives, les migrants ” non souhaités “ développent des stratégies de transgression et de passage des frontières de plus en plus complexes et périlleuses, créant parfois des zones ” d’attente “ qui deviennent des lieux de vie sur certaines routes migratoires. Cette rigueur s’accompagne parallèlement de la construction d’espaces supranationaux dans lesquels au contraire la migration des élites est valorisée et contribue à  l’émergence d’identités régionales ayant vocation à  rayonner à  l’échelle mondiale. La concurrence internationale accrue, les transformations des modes de distribution, la création d’ensembles supra-étatiques comme l’UE, le MERCOSUR ou l’ALENA et la négociation d’accords migratoires avec un nombre croissant de pays tiers jouent ainsi en faveur d’une recomposition du travail salarié et de la position des étudiants et intellectuels étrangers dans les pays récepteurs.

La force de travail des étrangers, envisagée comme moins chère et plus compétitive parce que moins protégée — dans le texte et/ou dans les faits — par les États, est plus que jamais prisée dans des secteurs économiques qui ne bénéficient guère de la globalisation des échanges ou qui en restent à  l’écart. Parallèlement, les pays récepteurs établissent de plus en plus d’accords d’importation de main-d’œuvre temporaire et contrôlent la délivrance des visas étudiants, valorisant ceux issus de ”pays riches “ mais limitant le nombre et la durée des titres de séjour des migrants du Sud, vis-à -vis desquels ils conservent le pouvoir de les renvoyer à  tout moment et s’abstiennent de mettre en place des politiques d’accueil et d’intégration.
Dans ce contexte — et compte tenu de la disparition des grands collectifs ouvriers industriels au profit d’une dissémination d’une main-d’œuvre plus diversifiée dans de petites entreprises au sein desquelles l’interethnicité est renforcée — les modalités de l’immigration sont transformées. Les stratégies des acteurs ne correspondent plus au modèle des années soixante-dix et quatre-vingt : la mobilité sectorielle et professionnelle, le passage par de multiples statuts juridiques plus ou moins précaires et le recours à  l’entrepreneuriat sous différentes formes sont devenus des étapes fréquentes dans la carrière des migrants. Ces nouvelles façons de s’inscrire dans la migration impliquent un réaménagement des relations avec le territoire d’origine et avec ceux qui jalonnent des parcours de vie parfois chaotiques. L’intégration sociale s’en trouve profondément redéfinie.

Ce sont tous ces aspects que nous entendons étudier dans ce programme à  travers des terrains d’enquête centrés sur :

 Les mobilités de la main-d’œuvre temporaire entre l’Europe et le Maghreb (S. Potot)

 Les migrants boliviens et paraguayens dans l’industrie du textile au Brésil (Dom. Vidal, S. Souchaud)

 Les logiques migratoires dans le secteur de la pêche au Sénégal (M. Timera)

 Les mobilités pour études et l’internationalisation de l’enseignement supérieur (V. Erlich)

 Mobilité de cadres et d’entrepreneurs impliqués dans les affaires entre l’Afrique et l’Amérique Latine (M. Paris)

Thèses en cours : Mobilités des étudiants mexicains vers la France (M. Anglada) ; Le marché ” de l’Oued “ à  Nice (R. Dahhan) ; Mobilités artistiques (A. Després) ; activités commerciales de migrants maliens en France et au Mali (B. Dicko) ; Migrations qualifiées internationales. Mobilités et carrières de professionnels de la santé originaires d’Afrique de l’Ouest (C. Fitaten Hounsou) ; Femmes migrantes dans l’agriculture saisonnière en Espagne (E. Hellio) ; Migration des élites africaines en France (F. Tandjigora)