Soutenance de Romane Blassel

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Romane Blassel a soutenu publiquement sa thèse de doctorat en sociologie intitulée « (Dé)construire la race. Socialisation et conscientisation des rapports sociaux chez les diplômé·e·s du supérieur » le mercredi 3 février 2021 à l’Université Côte d’Azur.

Composition du jury :

  • Mme Géraldine BOZEC, Université Côte d’Azur (Co-directrice de thèse)
  • M. François DUBET, Université de Bordeaux (Examinateur)
  • M. Abdellali HAJJAT, Université Libre de Bruxelles (Examinateur)
  • M. Christian RINAUDO Université Côte d’Azur (Directeur de thèse)
  • Mme Emmanuelle SANTELLI, Centre Max Weber (Rapporteure)
  • M. Patrick SIMON, INED (Rapporteur)

Mots-clés : racialisation, socialisation, conscientisation, racisme, discrimination, diplômés.

Résumé :

La thèse étudie l’expérience de la racialisation rapportée par des personnes diplômées de l’enseignement supérieur en France. Elle s’appuie sur une enquête qualitative par entretiens biographiques menés entre 2017 et 2019 auprès de diplômé·e·s de Master, né·e·s en France de parents étrangers, ou arrivé·e·s en France pour leurs études. Elle met en perspective les parcours d’hommes et de femmes d’origines diverses (Afrique du Nord et subsaharienne, Asie, Amérique du Sud, Outremer, Europe), et de trajectoires sociales variées. 

Cette recherche interroge les variations dans les récits, et met en lumière le processus de conscientisation du rapport de race, en interaction avec le rapport de classe et de sexe. Dans ce travail, la conscientisation désigne un processus continu de traitement cognitif d’un signal, lequel conduit, dans un contexte donné, à interpréter une situation comme racialisante ou non. L’enquête montre que les caractéristiques sociales, politiques et migratoires des enquêté·e·s, leur degré d’exposition au risque discriminatoire ou l’idée de « frustration relative » ne suffisent pas à expliquer pourquoi certain·e·s enquêté·e·s interprètent leur expérience en termes de race et de racisme, quand d’autres ne le font pas. L’hypothèse principale défendue dans ce travail met l’accent sur le rôle de la socialisation dans la conscientisation des rapports de race. Mon travail discute et précise alors la notion de socialisation raciale en mettant en évidence sa complexité et sa pluralité. Il identifie trois dimensions essentielles de la socialisation raciale : la socialisation relationnelle (relations familiales, amicales, scolaires, professionnelles), la socialisation intellectuelle (accès aux connaissances, notamment sur le racisme), et la socialisation expérientielle (apprentissage de la « visibilité » et des contextes de stigmatisation et de discrimination). Le contexte français, caractérisé par la massification de l’enseignement supérieur et l’essor de l’antiracisme post- et décolonial, est également présenté comme un élément socialisateur. 

La thèse analyse les effets de la conscientisation du rapport social de race sur la relation à soi-même et à autrui. Elle montre que cette conscientisation peut prendre différentes formes, qui orientent le récit du parcours et de la vie quotidienne. Selon ces différentes formes, la personne enquêtée exprime une acceptation, une contestation, ou une minimisation de la position minoritaire. Chacune de ces formes influe également sur les ressentis, sur les perspectives scolaires et professionnelles, et sur la sociabilité. 

L’enquête montre comment la position de classe revendiquée par les enquêté·e·s influence la perception de leur place dans le rapport de race. En mettant l’accent sur le processus de conscientisation, la thèse enrichit la compréhension de l’articulation des rapports sociaux de race, de sexe et de classe.